hic Δ nunc ↓→ Monade → Phénome → Phénomène → Univers →↑ Multivers
entropie ↑→ in-formation → linéament → puissance → mémoire →↓ créativité
Par linéament de la Monade, j’entends l’interface qui sépare son milieu intérieur de son milieu extérieur. Ou plus précisément encore, l’interface qui circonscrit son corpus au sein de son habitus.
Je caractérise ce linéament de la Monade comme ouvert en tant qu’il est lieu d’échange de flux entropique, c’est-à-dire lieu d’échange, indissociablement, d’énergie puisée au flux énergétique immanent de l’entropie et de hasard puisé au flux stochastique immanent de l’entropie.
Par in-formation, j’entends tout échange substantiel et/ou essentiel entre Monades dès lors que cet échange procède des différentiels de leurs flux entropiques respectifs. Différentiels de flux révélés par les trans-in-formations des linéaments des Monades impliquées.
Par suite, par in-formation, j’entends l’ensemble des empreintes ou traces laissées par ces échanges sur la mémoire (hylétique, perceptive, affective et cognitive) de la Monade, ce qui inclut en conséquence l’ensemble des incidences hylétiques, perceptives, affectives et cognitives de ces échanges que sont respectivement ses consistances, ses percepts, ses affects et ses concepts sur les modalités d’exercice de sa puissance (hylétique, perceptive, affective et cognitive).
Toute in-formation est l’expression d’un échange de flux entropique, c’est-à-dire un fragment d’entropie, un fragment d’immanence, un fragment fini de son énergie infinie et inépuisable et, indissociablement, un fragment fini de sa stochasticité infinie et incoercible. Toute in-formation est donc nécessairement un multiple d’in-formations de sorte que l’in-formation élémentaire, unaire, n’existe pas.
. .
De même que j’entends distinguer plusieurs modes de persistance de la mémoire et plusieurs modes d’exercice de la puissance d’une Monade, j’entends distinguer autant de classes d’in-formation, c’est-à-dire de classes dialogiques empreinte Δ support, ou message Δ médium, etc. :
Je caractérise ainsi le linéament de la Monade comme interface in-formative, c’est-à-dire comme lieu d’échange réciproque d’in-formation entre son corpus et son habitus.
../... l’individuation de la Monade par les autres Monades de son milieu extérieur, de son habitus, procède des in-formations qui s’y récursent et l’impactent.
"It from bit" "Je crois que ma vie en physique se divise en trois périodes (...) J’ai d’abord cru que tout était fait de particules (...). Dans ma seconde période que tout était fait de champs (...) Dans cette troisième, mon impression est que tout est fait d’information."
( John Archibald Wheeler ).
Telle qu’aurait pu l’énoncer l’hylémorphisme aristotélicien, une in-formation est à proprement parler une mise en forme. Une matière informe, qui n’a pas encore été (in)formée n’est encore que chaos. Aristote prenait volontiers l’exemple du bloc de marbre avant que le sculpteur ne le travaille. Lorsque dans ce bloc l’artiste dégage la statue d’un dieu, il lui donne une forme que la matière contenait en puissance, virtuellement. Le travail du sculpteur (comme de toute technique) est proprement une in-formation de substance. "Le médium est le message" ajouterait McLuhan.
Telle qu’aurait pu l’énoncer Edgar Morin, une in-formation est à proprement parler une métamorphose, au sens où face à une menace qu’elle parvient à assimiler, la monade n’a que deux possibilités : se désintégrer ou se métamorphoser pour persévérer dans son être.
"Toute métamorphose paraît impossible avant qu’elle survienne." (Edgar Morin - La Méthode).
Le médium est un filtre . . introduire ici le TETRAD de McLuhan (ou FourFold d’Heidegger) . . .
L’in-formation est toujours trace, empreinte, en tant que témoignage effectif d’une modulation hylémorphique, que ce soit passivement comme stigmate, comme trace rémanente, ou activement comme symptôme exprimé, comme message émis, ou les deux à la fois, dialogiquement, quand la modulation est transmise.
Dès lors que le linéament de la Monade est une interface bidirectionnelle, toute in-formation, d’abord de portée substantielle dans la forme (hylémorphique), peut aussi être de portée substantielle dans la composition, dans la consistance, des milieux intérieurs et extérieurs impliqués. Autrement dit, toute in-formation qui engage un échange de substance à l’interface d’une Monade est aussi une in-corporation. In-corporation de substance du milieu extérieur dans le milieu intérieur, et in-corporation de substance du milieu intérieur dans le milieu extérieur.
Un cas aux limites de l’in-formation in-corporative, ou de l’in-corporation, est ce qu’on appelle le mouvement des corps, dans lequel c’est l’habitus qui incorpore le corpus. Le mouvement d’un corps, d’une Monade dans son milieu extérieur, est une in-corporation de la Monade par son milieu extérieur. Même s’il n’y a pas d’échange de substance, et même s’il n’y a pas de modification sensible de forme du corpus de la Monade (de flux entropique très inférieur), il y a néanmoins modification de son habitus (de flux entropique très supérieur). Qu’est-ce qu’une situation dans laquelle le différentiel de flux entropique est inverse ? Qu’est-ce qu’un corpus très instable dans un habitus très stable ? Pourquoi cette question se pose-t-elle ?
Les in-formations inter-monadiques interfèrent et font lieu de leurs interférences. Se créent alors des
"Zones d’indiscernabilité : Zone de recouvrement de deux ensembles en intersection, soulignant des contiguïtés insoupçonnées, annonçant des devenirs
paradoxaux, elle marque un lieu de transformation, de création, d’émergence." (Noëlle Batt, « Zone d’indiscernabilité », in Le vocabulaire de Gilles Deleuze (sous la dir. Robert Sasso et
Arnaud Villani), Les Cahiers de Noesis n° 3, Printemps 2003, p. 343.) :
[Ces zones d’indiscernabilité vont s’affirmer comme indissolublement liées à l’activité de l’art :] « Seule la vie crée de telles zones où tourbillonnent les vivants, et seul l’art peut y atteindre et y pénétrer dans son entreprise de co-création. C’est que l’art vit lui-même de ces zones d’indétermination (…). » (Gilles Deleuze et Félix Guattari, Qu’est-ce que la philosophie ?, Ed. Minuit, 1991, p. 164.)
Pour Alfred North Whitehead, on peut même substituer le terme d’énergie au concept d’intensité émotionnelle quantitative, et celui de forme d’énergie au concept de forme spécifique de sentir. Il y a donc correspondance entre transmission d’énergie dans le monde physique et communication d’émotion. ( Maurice Elie - Whitehead, Procès et Réalité - ellipses )
L’in-formation se manifeste toujours dans une dialogique signe Δ support, ou message Δ médium, etc., en somme dans toutes variantes de la dialogique forme Δ matière. L’hylémorphisme de la physique aristotélicienne est moins celui de la substance monadique que celui de l’in-formation inter-monadique.
L’in-formation n’est que traces persistantes de relations intempestives entre Monades, c’est-à-dire traces néguentropiques, traces de résistances aux errances de l’Entropie. Or, dans un Univers donné, toute Monade est composition consistante de Monades constituantes. Par ailleurs, la première Monade d’un Univers spontanaissant est a minima composition d’un multiple de deux hic Δ nunc simples qui s’instancient par leur relation, . . qui se substancient sous l’effet de leurs premiers partages de flux (négu)entropiques, . . qui co-émergent en tant que substance et relation (cf. le structuralisme de l’interface agissante de Michel Bitbol). En conséquence, j’énonce que tout Univers n’est qu’in-formations.
Il n’y a différence que dans la répétition dirait Deleuze, il n’y a d’événement que par la répétition ajouterait Belhaj Kacem, en somme il n’y a in-formation que dans la différAnce, que par dé(re)construction, dirait Derrida, et aussi par de(re)territorialisation conclurait Guattari.
"La sensation est toujours d’abord la pression d’un force sur moi, une impression plus ou moins provocante, quoique confuse. Aucun signe n’est clair d’emblée, ni ne participe d’une lumière naturelle de la raison. Venu du dehors, il n’est pas reconnu, il exprime une incompréhension, une stupeur initiale."
( Jean-Clet Martin - Deleuze, § Différence et répétition )
"Quand on travaille, on est forcément dans une solitude absolue. On ne peut pas faire école, ni faire partie d’une école. Il n’y a de travail que noir et clandestin. Seulement c’est une solitude extrêmement peuplée. Non pas peuplée de rêves, de fantasmes ni de projets, mais de rencontres. Une rencontre, c’est peut-être la même chose qu’un devenir ou des noces. C’est du fond de cette solitude qu’on peut faire n’importe quelle rencontre. On rencontre des gens (et parfois sans les connaître ni les avoir jamais vus), mais aussi bien des mouvements, des idées, des événements, des entités. Toutes ces choses ont des noms propres, mais le nom propre ne désigne pas du tout une personne ou un sujet. Il désigne un effet, un zigzag, quelque chose qui passe ou qui se passe entre deux comme sous une différence de potentiel : "effet Compton", "effet Kelvin". Nous disions la même chose des devenirs : ce n’est pas un terme qui devient l’autre, mais chacun rencontre l’autre, un seul devenir qui n’est pas commun aux deux, puisqu’ils n’ont rien à voir l’un avec l’autre, mais qui est entre les deux, qui a sa propre direction, un bloc de devenir, une évolution a-parallèle. C’est cela, la double capture, la guêpe ET l’orchidée : même pas quelque chose qui serait dans l’un, ou quelque chose qui serait dans l’autre, même si ça devait s’échanger, se mélanger, mais quelque chose qui est entre les deux, hors des deux, et qui coule dans une autre direction. Rencontrer, c’est trouver, c’est voler, mais il n’y a pas de méthode pour trouver, rien qu’une longue préparation. Voler, c’est le contraire de plagier, de copier, d’imiter ou de faire comme. La capture est toujours une double-capture, le vol, un double-vol, et c’est cela qui fait non pas quelque chose de mutuel, mais un bloc asymétrique, une évolution a-parallèle, des noces, toujours "hors" et "entre". Alors ce serait ça un entretien.
Les relations sont au milieu, et existent comme telles. Cette extériorité des relations, ce n’est pas un principe, c’est une protestation vitale contre les principes. En effet, si l’on y voit quelque chose qui traverse la vie, mais qui répugne à la pensée, alors il faut forcer la pensée à la penser, en faire le point d’hallucination de la pensée, une expérimentation qui fait violence à la pensée. [...] Si l’on prend comme fil conducteur, ou comme ligne, cette extériorité des relations", on voit "se déployer morceau par morceau, un monde très étrange, manteau d’Arlequin ou patchwork, fait de pleins et de vides, de blocs et de ruptures, d’attractions et de distractions, de nuances et de brusqueries, de conjonctions et de disjonctions, d’alternances et d’entrelacements, d’additions dont le total n’est jamais fait, de soustractions dont le reste n’est jamais fixé."
( Gilles Deleuze & Claire Parnet, Dialogues, p.13 & p.69 )
Une in-formation fortuite, Shannon l’appellerait information :
L’entropie de la source d’information mesure l’incertitude du récepteur par rapport à ce que la source transmet. Si une source est réputée envoyer toujours le même symbole, disons la lettre ’a’, alors son entropie est minimale. En effet, un récepteur qui connait les statistiques de transmission de la source est assuré que le prochain signal sera un ’a’. Le récepteur n’a pas besoin de recevoir de signal pour lever l’incertitude sur ce qui a été transmis par la source car celle-ci n’engendre pas d’aléa. En revanche, si la source est réputée envoyer un ’a’ ou un ’b’, le récepteur est incertain. L’entropie de la source dans ce cas est non nulle (positive) et représente quantitativement l’incertitude qui règne sur l’information émanant de la source. Du point de vue du récepteur, l’entropie est la mesure de la quantité d’information qu’il lui faut obtenir pour lever complètement l’incertitude sur ce que la source transmet.
[...] Une heccéité peut durer autant de temps, et même plus de temps nécessaire au développement d’une forme et à l’évolution d’un sujet. mais ce n’est pas le même type de temps : temps flottant, ligne flottante de l’Aïôn, par opposition à Chronos. Les heccéités sont seulement des degrés de puissance qui se composent, auxquels correspondent un pouvoir d’affecter et d’être affecté, des affects actifs ou passifs, des intensités. [...] C’est l’heccéité qui a besoin de ce type d’énonciation. Heccéité = Evènement. [...] Une chose, un animal, une personne ne se définissent plus que par des mouvements et des repos, des vitesses et des lenteurs (longitude), et des affects, des intensités (latitude). Il n’y a plus de formes, mais des rapports cinématiques entre éléments non formés ; il n’y a plus de sujets, mais des individuations dynamiques sans sujet, qui constituent des agencements collectifs. Rien ne se développe, mais des choses arrivent en retard ou en avance, et entrent dans tel agencement d’après leurs compositions de vitesse. Rien ne se subjective, mais des heccéités se dessinent d’après les compositions de puissances et d’affects non subjectivés. Carte des vitesses et des intensités.
- L’heccéité, ou eccéité, est un terme de philosophie médiévale qui renvoie à l’essence singulière de chaque chose.
- A l’origine, aïôn est un mot du grec ancien qui se traduit parfois par "éternité". Gilles deleuze reprend ce terme pour penser un temps non pas linéaire, chronologique, mais confondu avec le surgissement de l’évènement.
( Gilles deleuze - Dialogues avec Claire Parnet )
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