hic Δ nunc ↓→ Monade → Phénome → Phénomène → Univers →↑ Multivers
Ma Monadologie, naturellement suscitée et inspirée par celle de Giordano Bruno, puis de Leibniz, n’en adopte pas l’axiomatique : "La Monade n’est autre chose qu’une substance simple, qui entre dans les composés ; simple, c’est-à-dire sans parties." ; pour lequel encore : "II n’y a point de dissolution à craindre, et il n’y a aucune manière concevable par laquelle une substance simple puisse périr naturellement." ; et pour lequel même : "Les monades n’ont point de fenêtres par lesquelles quelque chose y puisse entrer ou sortir."
Ma Monadologie n’adopte pas non plus la théodicée de Leibniz, elle n’adopte pas la transcendance d’un Dieu, d’une justice divine assurant l’harmonie entre les substances du meilleur des Mondes possibles. Ma Monadologie est immanentiste et n’accorde au mot Dieu que la définition qu’en donne Spinoza : celle de cette cause première dont l’essence est sa puissance-même, et qui n’a aucun principe ou fin de son exister ou de son agir. Je désigne cette essence première par le mot Entropie.
Ma Monadologie est à la fois une métaphysique et une physique. Une métaphysique en ceci qu’elle énonce l’existence d’une essence première dont émerge tous les Univers et par suite toutes choses dans ces Univers. Une physique en ceci qu’elle énonce l’existence de ces choses, de ces Monades, comme "déterminées par les lois de la nature" telles que celles énoncées par la théorie du chaos déterministe (pour sa très haute sensibilité aux conditions initiales, concept miroir du clinamen épicurien), par la cybernétique (moins pour sa gouverne que pour ses boucles auto-régulatrices), par la systémique en somme (comme machinisme universel aux agencements infinis, diraient Deleuze & Guattari), par le paradigme d’auto-organisation des systèmes dynamiques ouverts et imbriqués (diraient encore Henri Atlan, Edgar Morin), par le paradigme d’émergence à la fois causale et spontanée des phénomènes complexes tels que ceux mis en évidence expérimentale, par exemple, dans le cadre des théories de la psychologie cognitive, etc. ; paradigmes qu’elle adopte dans toute leur généralité et universalité, c’est-à-dire à toutes les échelles de composition des complexions des Univers.
Ainsi, je ne définis pas la Monade comme unité indivisible, c’est-à-dire comme plus petite particule élémentaire, inaltérable, pouvant participer à la constitution d’un tout. Je définis la Monade comme unité consistante, nécessairement constituée et constituante, c’est-à-dire à la fois
Par unité consistante, j’entends l’unité d’un tout en tant que sa composition elle-même est consistante, c’est-à-dire à la fois complète et cohérente de sorte que ce tout soit perçu comme une substance en soi dans l’Univers où il émerge, où il consiste, c’est-à-dire où il conserve le rapport de mouvement et de repos que ses parties ont entre elles.
Par suite, je pose que la Monade peut être créée ou dissoute "naturellement", sans intervention transcendante, mais par les seuls effets conjugués des lois de transformation propres des complexions de l’Univers où elle émerge, puis où elle consiste, enfin où elle s’épuise quand elle ne parvient plus à conserver le rapport de mouvement et de repos que ses parties ont entre elles.
Par suite, je pose que la Monade est ouverte, que son linéament est une interface perméable. C’est en cela que la Monade ainsi définie n’est pas un indivisible puisqu’elle peut, à travers son linéament, interagir avec son Univers englobant, en substance et par essence.
Je n’élude pas la question de la partie élémentaire d’un tout, c’est-à-dire la détermination de l’unité indivisible. Je pose que celle-ci n’existe pas ; je pose que le "Un" aussi élémentaire soit-il dans un Univers est toujours un "TOUT" constitué, une unité consistante, c’est-à-dire déjà une Monade.
Je pose que l’unité indivisible ne peut pas être la Monade simple puisque l’unité indivisible ne peut pas être un composé, ne peut pas être unité consistante.
Je pose que l’unité indivisible ne peut pas être non plus le hic Δ nunc simple puisque celui-ci est virtuel, que sa persistance est nulle tant qu’il n’est pas instancié en Monade, tant qu’il n’est pas . . substancié.
Ainsi je pose qu’il n’y a rien entre le hic Δ nunc simple, virtuel, et la Monade simple, actuelle. Je pose que la première Monade d’un Univers spontanaissant est a minima composition d’un multiple de deux hic Δ nunc simples qui s’instancient par leur relation, qui se substancient sous l’effet de leurs premiers échanges de flux (négu)entropiques, qui co-émergent en tant que relation (négu)entropique s’in-formant en substance (au sens de l’interface agissante de Michel Bitbol). En résumé, je pose que la première Monade , aussi élémentaire soit-elle, est déjà un processus d’in-formation, autrement dit que la première Monade d’un Univers est toujours a minima immédiatement duelle. Dans un Univers l’Un n’est pas . . mais il y a de l’un (diraient Alain Badiou avec Cantor) mais chacun (chaqu’un) est un multiple a minima duel.
Par classe, j’entends l’ensemble des substances semblables d’un Univers en tant qu’elles procèdent des mêmes attributs. Par suite, j’entends également par classe, la base d’attributs qui caractérise cet ensemble.
Par métaclasse, j’entends la base d’attributs qui caractérise un ensemble de classes. À ce titre, une métaclasse est toujours une classe ; alors que l’inverse n’est pas toujours décidable.
Par instance, j’entends une occurrence singulière, dans un Univers donné, d’une substance (resp. d’une classe) qui actualise les attributs d’une classe (resp. d’une métaclasse).
Par métamodèle, j’entends la caractérisation des attributs et des classes de la présente Monadologie.
IMPORTANT : La loi de composition mutuelle des classes de la Monadologie t’CG est celle d’une structure imbriquée de type "mère Gigogne", ou "Matriochka", ainsi :
linéament |
perceptible | (face externe de l’interface) | OUI |
OUI |
OUI |
OUI |
Ø |
perceptif | (face interne de l’interface) | Ø |
OUI |
OUI |
OUI |
Ø | |
puissance |
hylétique | (d’in-former une structure) | Ø |
OUI |
OUI |
OUI |
OUI |
perceptive | (d’in-former des percepts) | Ø |
OUI |
OUI |
OUI |
?.. | |
affective | (d’in-former des affects) | Ø |
Ø |
OUI |
OUI |
?.. | |
cognitive | (d’in-former des concepts) | Ø |
Ø |
Ø |
OUI |
?.. | |
mémoire |
hylétique | (perdurance de la structure) | Ø |
OUI |
OUI |
OUI |
OUI |
perceptive | (perdurance des percepts) | Ø |
OUI |
OUI |
OUI |
?.. | |
affective | (perdurance des affects) | Ø |
Ø |
OUI |
OUI |
?.. | |
cognitive | (perdurance des concepts) | Ø |
Ø |
Ø |
OUI |
?.. | |
Par linéament, j’entends une surface topologique fermée à N-1 dimensions, d’aire non nulle mais d’épaisseur nulle, définie dans l’espace à N dimensions d’un Univers donné.
J’entends caractériser cette surface comme une interface bidirectionnelle entre milieu intérieur et milieu extérieur, un lieu d’échange de flux entropique, c’est-à-dire indissociablement un lieu d’échange d’énergie (de flux énergétique) et de hasard (de flux stochastique), autrement dit un lieu d’échange d’in-formation au sens étymologique du terme, un lieu d’échange de mise-en-forme, de modelage-de-forme, de trans-formation, de trans-in-formation.
J’entends caractériser cette interface du point de vue du contenant, c’est-à-dire de son Univers englobant ; autrement dit la caractériser comme pouvant être perçue, voire même seulement conçue, par son Univers englobant.
Ainsi, par linéament perceptible d’un hic Δ nunc donné, j’entends l’ensemble des surfaces constituant l’enveloppe perceptible de ce hic Δ nunc par tout ou partie de l’Univers englobant.
J’entends également caractériser cette interface du point de vue du contenu ; c’est-à-dire la caractériser comme pouvant être actualisée par une substance émergeant d’un Univers donné.
Ainsi, par linéament perceptif d’une Monade donnée, j’entends l’ensemble des surfaces constituant l’interface perceptive de cette Monade, interface perceptive sensible à tout ou partie de l’Univers englobant.
Par suite, j’entends par milieu intérieur d’une Monade le contenu de son linéament perceptible, c’est à dire son corps, et par milieu extérieur, son environnement, son éco-système, le reste de l’Univers dans lequel elle émerge, consiste et persiste.
Dès lors qu’il est à la fois perceptible et perceptif, le linéament d’une Monade est autant un obstacle qu’une issue, autant une fenêtre qu’un miroir. Il est un filtre au sens large, un lieu d’accueil et/ou de rejet, un lieu de différenciation, d’opposition, de dé(re)territorialisation, de dé(re)construction, en somme un lieu de manifestation d’évènements, en un mot . . un lieu d’échange d’in-formation.
Je reprends ici le concept spinozien de conatus que je ne traduis pas par effort, mais par puissance ou, à la manière de Deleuze, par effectuation de la puissance.
Ainsi, avec les mots de Spinoza, par puissance, j’entends la capacité de la Monade à persévérer dans son être, ou plus proprement à persévérer dans son devenir, ce qui n’est rien en dehors de son essence-même.
Mais, considérant que "Rien n’est plus permanent que l’évolution de tout, éternellement" (cf. l’axiomatique t’CG), c’est-à-dire qu’il ne peut y avoir persévérance de quoi que ce soit sans qu’il y ait, nécessairement et concomitamment, transformation de ce quoi que ce soit :
alors par puissance, j’entends la capacité de la Monade à persévérer dans son devenir en actualisant du potentiel, du possible ou du virtuel, que ce soit en substances et/ou en essences, que ce soit "en puissance" ou "en acte", que ce soit passivement ou activement, quelles que soient les conditions de possibilités et les déterminations réunies par toutes les autres Monades impliquées en tant qu’objets Δ sujets dans cette actualisation, dans cette effectuation.
Je distingue trois conditions de possibilité nécessaires à l’exercice de la puissance pour que s’effectue cette actualisation :
Par mode, j’entends la manière par laquelle la Monade exerce et fait l’expérience de sa puissance. J’entends distinguer plusieurs modes d’exercice de cette puissance :
Par suite, par puissance hylétique, j’entends également la capacité de la Monade à faire l’expérience de sa puissance en modifiant ses performances homéostasiques pour entretenir la consistance de sa mémoire hylétique.
Par suite, par puissance perceptive, j’entends également la capacité de la Monade à faire l’expérience de sa puissance en adaptant la sensibilité de ses dispositions perceptives pour entretenir la consistance de sa mémoire perceptive et donc de sa mémoire hylétique.
Par suite, par puissance affective, j’entends également la capacité de la Monade à faire l’expérience de sa puissance en modifiant la justesse de ses jugements affectifs pour entretenir la consistance de sa mémoire affective.
Par suite, par puissance cognitive, j’entends également la capacité de la Monade à faire l’expérience de sa puissance en vérifiant en continu le caractère vrai Δ faux (ie. la pertinence) de ses concepts et à en former de nouveaux pour entretenir la consistance de sa mémoire cognitive.
Par suite, par puissance hylétique, j’entends également la capacité de la Monade à faire l’expérience de sa puissance pour orienter les trans-in-formations de son milieu extérieur, pour entretenir la consistance de ses mémoires, y compris l’homéostasie de son milieu intérieur.
La mobilité de la Monade, subie ou gouvernée, est un mode de sa puissance hylétique.
Par mémoire, j’entends la capacité de la Monade à maintenir la consistance de ce que sa puissance actualise, que ce soit en substance et/ou en essence, que ce soit "en puissance" ou "en acte", que ce soit passivement ou activement.
Par mode, j’entends la manière par laquelle la Monade entretient sa mémoire, quelles que soient les conditions de possibilités et les déterminations réunies par tous les objets Δ sujets impliqués. J’entends distinguer plusieurs modes de cette persistance mnésique :
Par consistance de son milieu intérieur, j’entends la capacité de la Monade à demeurer (en substance) co-présente à elle-même pour la durée pendant laquelle son milieu intérieur est reconnue persévérer (en substance) dans son "devenir lui-même", par la Monade elle-même ou par des Monades de son milieu extérieur.
Par co-présence de la Monade à elle-même, j’entends le processus de réminiscence par lequel la Monade est concomitamment virtuelle en amont de l’elle-même qui passe, et actuelle en aval de l’elle-même qui vient.
Par suite, par mémoire perceptive, j’entends également la capacité de la Monade, exerçant et faisant l’expérience de sa puissance, à entretenir par réminiscence la consistance des empreintes de ses percepts révolus sous l’action de ses percepts actuels.
Par suite, par mémoire affective, j’entends également la capacité de la Monade, exerçant et faisant l’expérience de sa puissance, à entretenir par réminiscence la consistance des empreintes de ses affects.
Par suite, par mémoire cognitive, j’entends également la capacité de la Monade, exerçant et faisant l’expérience de sa puissance, à entretenir par réminiscence la consistance des empreintes de ses concepts.
Par suite, par mémoire hylétique, j’entends également la capacité de la Monade, exerçant et faisant l’expérience de sa puissance, à entretenir la consistance de ses hypomnemata, c’est-à-dire la consistance des trans-in-formations de son milieu extérieur.
Un linéament divise l’Univers en deux : un contenu fini d’une part, dans un contenant possiblement infini d’autre part. Un linéament est en cela une enveloppe, enveloppe du contenu (du point de vue du contenant), autant qu’enveloppe du contenant (du point de vue de ce contenu). Un linéament est sans étendue (ie. d’épaisseur nulle) parce qu’ainsi défini, il n’est qu’une interface, un lieu sans substance mais lieu de co-présence mitoyenne d’un contenu et d’un contenant, lieu de co-errAnce, lieu de rencontre pure "hors" et "entre" comme le rappelle souvent Deleuze en explorant la métaphore de la guêpe et de l’orchidée.
Un linéament de Monade est un vide médian au sens taoiste du terme. La Monade étant l’"unité consistante" constituée et constituante, on peut poser que tout Univers est "plein" en tant qu’il n’est qu’un ensemble de Monades ; mais aussi que tout Univers est "vide" en tant qu’il n’est qu’un ensemble de vides médians. Il ne s’agit pas là d’une opposition paradoxale, ni même d’une dialectique, le "plein" et le "vide" s’opposant comme extérieurs l’un à l’autre, mais d’une dialogique que la t’CG énonce par la création du dialemme vide Δ plein.
En tant qu’interface, le linéament d’une Monade est autant un obstacle qu’une issue, autant une fenêtre qu’un miroir, il est un filtre au sens large, un lieu d’accueil ou de rejet, un lieu d’échange, un lieu de différenciation, d’opposition, de dé(re)territorialisation, de dé(re)construction, en somme un lieu de manifestation d’évènements, un lieu d’échange de flux entropique c’est-à-dire d’information.
Ce qu’il y a de plus profond en l’homme, c’est la peau.
(Paul Valery - L’idée fixe ou Deux Hommes à la mer)
[...] Chaque monade exprime le monde entier, mais chaque individuel est concentration - mot que Leibniz emploie - concentration d’un ensemble limité de singularités par rapport à l’ensemble infini des singularités du monde. La monade n’en exprime pas moins le monde entier parce que ses singularités sont prolongeables jusqu’au voisinage de toutes les autres singularités du monde. [...]
( Gilles Deleuze )
La capacité de la Monade à faire unité consistante l’apparente au démon de Maxwell en charge d’entretenir sa propre consistance pour conserver par lui-même le rapport de mouvement et de repos que ses propres parties constituantes ont entre elles. Mais l’expérience de pensée ainsi posée n’en conclut pas pour autant au déterminisme Laplacien ; dans un Univers où Rien n’est plus permanent que l’évolution de tout, éternellement, il ne peut y avoir persévérance et persistance d’un démon quel qu’il soit, que puisant au flux énergétique de l’Entropie, et donc se soumettant au flux purement stochastique absolument incoercible de celle-ci. Comme tout autre Monade, fût-ce en pensée, le démon de Maxwell et son déterminisme est nécessairement de puissance limitée et de durée finie.
"[...] Une heccéité peut durer autant de temps, et même plus de temps nécessaire au développement d’une forme et à l’évolution d’un sujet. mais ce n’est pas le même type de temps : temps flottant, ligne flottante de l’Aïôn, par opposition à Chronos. Les heccéités sont seulement des degrés de puissance qui se composent, auxquels correspondent un pouvoir d’affecter et d’être affecté, des affects actifs ou passifs, des intensités. [...] C’est l’heccéité qui a besoin de ce type d’énonciation. Heccéité = Evènement. [...] Une chose, un animal, une personne ne se définissent plus que par des mouvements et des repos, des vitesses et des lenteurs (longitude), et des affects, des intensités (latitude). Il n’y a plus de formes, mais des rapports cinématiques entre éléments non formés ; il n’y a plus de sujets, mais des individuations dynamiques sans sujet, qui constituent des agencements collectifs. Rien ne se développe, mais des choses arrivent en retard ou en avance, et entrent dans tel agencement d’après leurs compositions de vitesse. Rien ne se subjective, mais des heccéités se dessinent d’après les compositions de puissances et d’affects non subjectivés. Carte des vitesses et des intensités."
- L’heccéité, ou eccéité, est un terme de philosophie médiévale qui renvoie à l’essence singulière de chaque chose.
- A l’origine, aïôn est un mot du grec ancien qui se traduit parfois par "éternité". Gilles deleuze reprend ce terme pour penser un temps non pas linéaire, chronologique, mais confondu avec le surgissement de l’évènement.
( Gilles deleuze - Dialogues avec Claire Parnet )
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