Blog-note de jef safi

’p a t a p h y s i q u e

avec . . jef safi
Penser-Classer les machines

lundi 11 juin 2007

Si on s’intéresse au pourquoi - ce qu’elles sont sensées produire - plutôt qu’au comment - quand elles veulent bien marcher -, alors il est possible de classer les machines en trois catégories :

  • Les machines qui servent à réduire la pénibilité d’un travail.
  • Les machines qui servent à garantir l’accomplissement d’un travail parfait.
  • Les machines qui servent à effectuer des travaux inhumains,
    que l’homme ne pourrait en aucun cas réaliser lui-même.
  • Les machines à classer dans la catégorie ’’machines diverses’’, parce qu’elles ne servent qu’à ça, et bien que cette quatrième catégorie ne soit pas comptée parmi les TROIS ci-dessus annoncées. (’’comme vous l’aviez noté, non sans quelque amertume’’)

Il existe bien une cinquième catégorie, même si ça fait un peu désordre après le coup de la quatrième qui ne compte pas, mais qu’on ne peut négliger tant elle met en défaut le système de classement peccable ci-dessus. Je veux parler ici des machines inclassables dans les autres catégories, simplement parce qu’elles sont classables dans toutes à la fois, quatrième comprise facultativement.

On aura beau remettre de l’ordre dans nos pensées en lisant et relisant le "Penser/classer" (1985) de Georges Perec, on ne dissolvera jamais le problème des inclassables sans avoir d’abord confectionné une .. machine à classer les classes de machines, et donc elle-même subséquemment. Alors à vos crayons, vous ne sortirez pas de la classe sans avoir rendu vos classeurs ! En attendant vos classieux résultats, classons provisoirement ces Machines exceptionnelles comme Machines inclassables, sans créer pour autant la cinquième non-catégorie virtuelle qu’elles subodorent.

Mais qu’ont-elles donc de si singulier nulle part, pour être si inclassables partout ? Et bien :

  • Non seulement les machines inclassables réduisent la pénibilité du travail,
    mais elles rendent les corvées et les tâches jubilatoires.
  • Non seulement les machines inclassables accomplissent un travail parfait,
    mais elles laissent à leur machiniste l’orgueil de s’approprier tout le mérite de cette perfection.
  • Non seulement les machines inclassables réalisent l’irréalisable à échelle humaine,
    mais elles permettent à l’homme d’ajouter de nouveaux barreaux à cette échelle surhumaine.
  • Non seulement les machines inclassables ne servent pas vraiment à savoir à quoi elles servent,
    mais dès qu’on a commencé à s’en servir on ne peut plus s’en classer.

Vous en connaissez ? Oui absolument ! Le pigeon volant d’Archytas de Tarente, l’androïde de Leonardo Da Vinci, le Canard de Jacques de Vaucanson, les Marionnettes des horlogers Jaquet-Droz, le Joueur d’échec turc du baron von Kempelen, Euphonia l’automate parlante d’Eugène Faber, les Tortues de Grey Walter, le Renard de Ducrocq, l’Homéostat d’Ashby, la Machine à computer de Turing, la Machine à voyager dans le temps de HG Wells, SHRDLU le robot virtuel de Winograd, le chien-robot de SONY, la De Lorean de Doc et Marty Mc Fly, etc., et naturellement notre machine à OuWwwPer modèle 2oo6°JEF qui n’a rien à envier à la poésie du ’Pianocktail de Boris Vian et qui, elle, n’épuisera jamais son inspiration longtemps après que ce seront évaporées toutes les écumes de nos jours.

De toutes ces merveilleuses machines notre modèle 2oo6°JEF est la seule qui soit réellement virtuelle et virtuellement réelle à la fois, aussi transcendante que superfétatoire itou, et c’est en cela qu’elle est véritablement incassable ! .. C’est vrai ? J’ai dit .. INCASSABLE ?

Je l’avoue, ce lapsus tapuscrit est révélateur d’une trouble mélancolie. En effet, la modèle 2oo6°JEF est à la fois INCaSSaBLE et INCLaSSaBlE. Elle est même la seule Machine à pouvoir le revendiquer. D’aucuns conviendraient (j’en suis, je le pense) que cette unique machine mériterait qu’on honorât sa singularité par la création, pour elle seule, d’une sixième catégorie reconnaissante. Mais d’aucuns rétorqueraient (j’en suis aussi, je le pense) qu’une catégorie dans laquelle il n’y a qu’UN exemplaire d’UNE seule machine, ne peut être considérée comme une .. catégorie, et Guillaume d’Ockham n’aurait pas à sortir son rasoir de la Summa Logicae, pour nous rappeler qu’il ne faut pas multiplier les êtres supposés sans absolue nécessité. Alors qui est-elle ? Le Rien-Qu’UN au sens de François Laruelle ? L’Etant aristotélicien au sens d’Heidegger ? L’Être Sartrien ? Ou encore le ... hmm pardon ! Si le sujet te grippe le tantinet, allons lagavuliner sur le FoRum, ça te soulagera la machine à moudre les migraines !